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Dishonored 2 : Quand le level design sublime l’expérience de jeu.

Cet article n’est pas un test.

Voilà presque 20H que j’arpente les niveaux de Dishonored 2, de Dunwall à Karnaca je poursui ma quête et traque mes cibles. Tapis dans l’ombre j’observe chaque ouverture, ruelle et bâtiment à la recherche du meilleur chemin pour accomplir ma tache. Les possibilités sont nombreuses, plus que je ne le pensais avant de lancer le jeu. Au fil de mon avancée l’ivresse d’un level design de haute volée me gagne.

Entre les open worlds toujours plus grands mais souvent trop vides et les titres plus « couloirs » que l’on traverse sans vraiment se retourner il est difficile de trouver des jeux qui mettent véritablement le level design au centre de l’expérience. A la manière du reboot de Deus Ex le premier Dishonored proposait déjà d’avoir une approche non linéaire des niveaux, que l’on joue en mode bourrin ou fantôme. Les chemins étaient variés, tout comme les choix et les manières d’accomplir sa mission avec des intéractions plus ou moins directes avec nos cibles. L’expérience était déjà très immersive et réussie, la mise en chantier d’une suite avait de quoi susciter de grandes attentes et un passage au niveau supérieur.

Contrairement au récent Deus Ex Mindkind Divided le titre d’Arkane Studios n’a pas choisi d’avoir un hub agrémenté de quelques « sorties » vers d’autres destinations ponctuelles. Les missions de Dishonored 2 s’articulent autour de niveaux bien distincts même s’ils sont géographiquement proches, voir collés. Globalement ces aires de jeux peuvent paraître assez confinées par rapport à beaucoup d’autres titres, elles le sont en effet. Deux, trois rues au milieu d’immeubles d’habitations par ci, un seul et unique gros bâtiment par là, parfois un peu des deux, de petits quartiers en somme. Mais dans Dishonored 2 ce n’est pas la taille qui compte mais la densité et la cohérence.

Chaque niveau est pensé comme un petit bac à sable dans lequel nous sommes libres d’appréhender notre objectif comme bon nous semble. Que l’on choisisse d’être observateur ou d’avoir une approche plus directe notre progression n’est jamais pensée comme une ligne droite. Pour cause, une fois l’objectif de mission accompli il nous faudra revenir à notre point de départ et déguerpir à bord de notre petit canot. Du coup, que l’on ait opté pour semer le chaos ou non il faut toujours garder en tête qu’il faudra rebrousser chemin. Mais par où? Revenir sur nos pas? Changer de stratégie par manque de munitions? Cette mécanique d’aller retour nous permet d’aborder les niveaux sous un autre angle. En faisant marche arrière on observera une autre fenêtre ouverte, un autre passage, une autre méthode etc… L’immersion en est plus grande et notre cheminement ne se limite pas à des points A et B.

Dans la lignée de son prédécesseur Dishonored 2 joue également beaucoup sur la verticalité. Karnaca est faite d’immeubles imposants avec de nombreuses portes et fenêtres qui ne demandent qu’à être franchis. On ne regarde donc pas seulement autour de nous mais aussi au dessus et en dessous, le danger pouvant provenir de toute part dans certains bâtiments assez peuplés. Il est bien évidemment possible de passer par les extérieurs, de sauter de balcon en balcon, d’observer calmement les rondes de gardes en dessous avant de décider de notre prochain mouvement. Il nous arrivera même de ne pas explorer volontairement une partie de certains bâtiments, par manque de moyens où simplement parce qu’il est trop facile de s’y faire repérer si l’on choisi de jouer en mode « full stealth ».

Comme si « l’exploration libre » n’était pas suffisante, Dishonored 2 tout comme son aîné propose via des objectifs secondaires une alternative quand à la destinée de nos cibles. Une simple neutralisation de la personne en question ne suffira pas, mais un objet ou un document cachés dans une autre partie des lieux vous offrira une nouvelle possibilité. Et là encore le level design se révèle devant nous. On explore un nouvel endroit, de nouvelles portes nous font face, puis un couloir, une autre porte, un autre étage… les niveaux se révèlent parfois immenses à l’échelle du jeu. Parce que oui, un bâtiment de trois ou quatre niveaux avec une dizaine de pièces à chaque étage, c’est grand, très grand.

Que serait un bon jeu sans surprises? Comme nous nous intéressons ici au level design, Dishonored 2 (au point où j’en suis) m’a déjà servi deux belles cerises sur son gâteau. Sans entrer dans les détails je dirai simplement que l’exploration de deux manoirs transcendent littéralement l’expérience et l’approche du jeu, que se soit avec une superbe mise en abyme pour l’un, ou l’introduction d’une nouvelle mécanique pour l’autre. Une manière pour Arkane de surprendre le joueur et de varier une expérience déjà bien riche en possibilités.

Ainsi la rejouabilité des niveaux est grande et ça tombe bien puisqu’en nous proposant d’incarner deux personnages cette suite nous donne une excuse supplémentaire pour se réapproprier les environnements d’une manière différente et de les découvrir sous un autre angle. Si on rajoute à cela les pouvoirs et le fait d’en utiliser certains plus que d’autres, voir aucun, le champ des possibles est impressionnant.

Pour mon premier run j’ai choisi Emily avec pour objectif de ne jamais me faire repérer et de ne tuer personne (ce qui est raté sur ce dernier point, trois corps ayant probablement été mangés par des rats je ne vois pas d’autre possibilité). Cette orientation a parfois mis le holà sur mes envies d’exploration, certaines zones étant beaucoup trop risquées, même si jamais impossible à franchir. Du coup à chaque niveau traversé je n’ai qu’une seule envie, y retourner avec Corvo en mode chaos total et les redécouvrir de fond en comble sans cette contrainte de discrétion absolue.

Mais tout ceci n’atteindrait pas un tel niveau d’excellence sans une direction artistique à la hauteur. Il faut bien évidemment aimer le style mais si le premier jeu avait déjà frappé fort, ce second épisode arrive à franchir un nouveau palier. Chaque recoin est crédible et « vivant », on ne ressent jamais l’impression de déjà-vu lorsque l’on entre dans l’un des nombreux appartements abandonnés. Les décors ont une classe folle et la moindre petite pièce est pensée et habillée avec un véritable sens du détail qui ne sonne jamais faux. Bureaux, chambres, salles de bain, bibliothèques, cuisines, tableaux, mobilier et j’en passe, tout est crédible, tout « fait vrai » alors même que l’on se trouve dans une portion de niveau qui à priori ne « sert à rien » au premier abord, le soucis du détail est bluffant. Le « remplissage » était l’une de mes craintes, nous connaissons tous cette sensation de lieux copiés collés ou sans âmes.

Je ne sais pas vraiment où en est ma progression sur la trame principale de Dishonored 2 alors que je vais démarrer la mission 08. Mais une chose est certaine, je suis complètement sous le charme du level design proposé par les développeurs comme rarement j’ai pu l’être dans un jeu vidéo. Je prends plaisir à explorer la moindre parcelle de l’aire de jeu qui s’offre à moi, et la découverte des nouveaux lieux et environnements façonnés par Arkane est devenue une véritable source de motivation pour avancer avec l’espoir d’être de nouveau étonné. D’ailleurs l’édifice dans lequel se trouve ma prochaine cible me fait déjà saliver de l’extérieur tant il se démarque par rapport aux autres.

Il y a bien des choses à dire sur d’autres aspects positifs (et négatifs) de Dishornored 2, mais ce n’est pas le but de cet article. Même s’il ne fait pas tout, le level design était le point sur lequel j’attendais le plus le nouveau bébé d’Arkane Studios et les fondations de la franchise étaient suffisamment solides pour que je ne m’inquiète pas du reste. Le résultat est au delà de mes espérances, les niveaux que nous ont concoctés les développeurs sont chacun de petites merveilles en terme de plaisir de jeu et d’univers qui donnent envie que l’on s’y attarde et que l’on y revienne pour l’ivresse de la (re)découverte.

…et rien que pour cela Dishonored 2, est déjà une très grande réussite, et ce malgré mon expérience de jeu incomplète… et je l’espère encore riche en surprises.

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